Le brief... (vraiment brief en fait)
Bon, voilà, votre cliente vous dit que votre proposition pour l’aider à créer sa vision stratégique à 5 ans (soyons raisonnable : 10 ans ou 15 ans, en ce moment, ce serait aussi hallucinant que les IA, non?) est super. (bon, là vous savez qu’il y un Mais qui va arriver, un très gros MAIS en fait).
Mais (ah bah voilà, je vous avais prévenu !), on ne peut pas se permettre de passer une semaine sur le sujet (votre proposition mentionnait un Design Sprint de 5j d’affilée comme alternative basse 🤓). Alors, quant à prendre 1 mois pour que vous exploriez des « mega-trends » (mais qu’est-ce que c’est que ça vous demande-t-elle ?) pour qu’ensuite vous imaginiez des scénarios futurs (vous avez dû vous tromper de client, on n’est pas une boîte de production de séries télé ici vous savez monsieur le consultant – nous on fabrique des moteurs électriques)… tout ça pour faire un ou plusieurs ateliers dans lesquels on fera du backcasting (non mais c’est quoi cette manie que vous avez toutes et tous de mettre des mots anglais que personne ne comprend pour masquer la vacuité de vos activités).
Et là, comme vous êtes pro, vous ne contre-argumentez pas, surtout pas. Et vous attendez stoïquement le couperet qui va arriver : dehors ! Mais non, cette cliente veut travailler avec vous en fait. Mais pas longtemps. Vous avez 2h lors du codir dans 3 jours.
Parfait (vous êtes positif, hein?). Euh, 2h c’est pour amorcer le sujet, on est bien d’accord ? Non ? Ah ok, c’est 2h en tout, donc pour définir la stratégie (d’une boîte que je ne connais pas dans une industrie pour laquelle je n’ai jamais bossé). Moi qui ai l’habitude de dire à mes clients que justement, ne pas connaître leur marché ou leur domaine est une chance pour l’innovation : ça permet de revisiter le statu quo, de requestionner des positions figées, d’éviter les pièges de l’expertise pour définir le futur, …
Parfait, parfait (toujours au taquet de la positive attitude – ultra pro). Mais un peu inquiet quand même 🧐
Retour au bureau
En rentrant chez vous (au bureau, au home-office, au café), vous cogitez (en refoulant cette pensée négative entêtante qui vous entraîne vers le « c’est pas possible de faire de la stratégie en 2h ») et prenez cette contrainte comme une manière de trouver une voie créative (mais si mais si « créative » – avec vous-même, vous vous autorisez ce que vous ne diriez qu’à peu de personnes tant le mot « créatif » est entaché de biais, de mauvaises interprétations, de sous-entendus vaseux).
Alors soyons créatif… Hum hum…
💡Eureka ! (in peto, vous vous demandez comment vous pouvez vous laisser aller à tant de stéréotypes antédiluviens : l’ampoule pour matérialiser l’idée – une ampoule! à l’époque des LED aux formes toutes plus variées les unes que les autres, c’est un peu comme la disquette pour indiquer qu’on va sauvegarder un contenu en ligne 🤯 – et le Eureka, quel poncif quand même…)
Brèfle, vous vous dites que vous allez utiliser une IA pour faire le boulot de création du workshop atelier (pas trop d’anglais quand même, hein?) à votre place. Aller, c’est dit, allons faire bosser Bard, ChatGPT et leurs comparses (je me garderai bien de révéler les autres : secret de fabrique du consultant, na !).
Alors qu’ont-elles dans le ventre ces fameuses genAI ?
Dis Siri, ponds moi un atelier de vision stratégique...
Heu, non, pas Siri en fait. Alors qu’est-ce que ça donne du côté des IA créatives?
Premièrement, elles sont cohérentes entre elles. Leur réponse est à peu près identique avec le même prompt (et je révèle ici ma science, mon art du prompting, comme tout gouru de LinkedIn qui se respecte : » I’am an innovation consultant and I need to help a customer build its strategic vision for the next 5 years. We will have a 2 hour workshop with the steering committee to elaborate that vision. What would be the activities and the timing of such a workshop. What supporting canvas could help (what areas of interest should be highlighted)? «
Cohérent dans leur art consommé de ne pas savoir compter (6 x 30′ ça fait bien 2h pile poil, n’est-ce pas). Pas grave, on va ajuster. Pour le reste, le format est on ne peut plus convenu : 1°) où on est? 2°) où va-t-on? 3°) quelles priorités? et 4°) plan d’actions. C’est fiable, robuste et pratiqué depuis des générations (depuis que le consulting existe probablement). Mais ce n’est pas de l’innovation ça pensez-vous. Eh ben on doit pouvoir faire mieux. On va y revenir.
Deuxièmement, elles s’abreuvent aux mêmes sources (on n’est pas étonné évidemment). On va, en 2h siouplait, faire du SWOT, du PESTEL, du SMART, du BMGen ou même Lean Canvas et on (se) termine en apothéose avec un Impact-Effort… On leur en veut pas d’être très ambitieuses et … de se planter sur le fait que ça « tienne » pas dans le format : faut bien que nous, pauvres humains, on serve à quelque chose quand même ! C’est rassurant de savoir qu’on a encore une raison d’exister (vous noterez qu’un des motto de Future Path est justement de placer l’humain au centre de l’innovation : à la fois comme participant de la démarche et aussi au coeur des objets/services/systèmes imaginés dans le process – placement produit facile 😇)
Donc, comme on relit & vérifie tout ce que nous propose une IA, on va tenter d’améliorer les résultats.
Épisode 2 : Refined Learning
[Dis, pourquoi tu nous colles encore un truc anglais – et en plus tu cherches à faire le malin avec une pseudo référence au RLHF qui n’a rien demandé à personne dans ce contexte]
On va prompter autrement (prompter, ça rime avec Dompter, non? j’aime bien l’image : t’es au milieu d’une cage remplie d’IA carnassières et tu essaies de t’en tirer… – oups, cette analogie ne doit plus avoir cours puisque les spectacles d’animaux sauvages sont interdits #désolé). Le prompt qu’on propose reprend intégralement l’idée qu’on a en tête pour un tel atelier (pas encore certain qu’elle soit intégralement valide, mais c’est un début). On va donc insérer, dans le précédent prompt, notre idée sous la forme : » I want to be creative for the agenda. I’d like to start with exploring some mega-trends to dive into the future, then with some inspiring sources. After, we’ll have to come up with a kind of description of plausible future scenarios. Finally, we’ll develop the vision based on the preceding outcomes. What mega-trends to explore, what inspiring sources to get insights from? «
Vous noterez que j’ai réussi à lui refourguer le « creative » 🤭, le tout dans un mauvais anglais (même pas mal pour l’IA, ouf 😅).
Et donc le résultat ? (je ne dis plus « les résultats » car là encore, ils sont quasi identiques : est-ce que Google-Bard pourrait lui aussi porter plainte conte OpenAI-ChatGPT pour plagiat ?). Eh ben le résultat est … conforme au prompt, une forme de redite. En gros, tu lui donnes la solution et il te la recrache (un top consultant de première classe en fait) – en prime tu as le droit à un petit compliment (« great », yeah!).
En fait, le contenu tient bien la route et les pistes proposées sont piles celles que j’avais en tête, avec des éléments qui sont directement inspirés du Strategic Foresight (dont est dérivé la trame d’agenda en fait). Beau teaming donc.
Et en vrai ça donne quoi?
Il y a encore un peu de boulot de préparation (tout plein de canvas à créer, des mega-trends à creuser/choisir, des proto-scénarios à préparer, un timing à ajuster). Mais ça va le faire, j’en suis persuadé.
On a pris une photo de la réaction de la cliente lorsqu’on lui a proposé cette version remodelée. Elle nous a autorisé à la publier.
A suivre...
Mais peut-être auriez-vous envie de tester l’exercice vous aussi? Chaque contexte donne des résultats différents. Et 2h, c’est faisable, non?
Spolier alert : il y a un gros risque que vous vous preniez à l’exercice et découvriez lors de cet atelier des pistes à creuser plus profondément et plus intensément (avec nous… 👍)
Alors, pour nous contacter, c’est là. (deuxième placement produit subliminal 🙃)